Voreppe Avenir

Le Plan Local de l’Habitat remis en question ?

Conseil communautaire du Pays Voironnais du 24 février 2015

maison

capv

La programmation triennale du Plan Local de l’Habitat était à l’ordre du jour. Elle a pour vocation de présenter les opérations concernant le logement sur le territoire afin de vérifier que les objectifs du plan (avant tout, loger la population du Pays Voironnais) seront bien tenus.

Jean Duchamp est intervenu à la suite de la présentation pour exprimer notre vive inquiétude sur la fragilisation de ce Plan Local de l’Habitat et sa remise en question « subrepticement, en douceur »

Nous reproduisons ici son intervention. Le débat qui s’en est suivi n’a fait que confirmer les positions de chacun [1]


Programmation triennale de logements sociaux 2015/2017

Le PLH dont nous faisons un point d’étape aujourd’hui a été construit pendant 3 ans et a été voté à la quasi unanimité lors du dernier mandat (seul Moirans ne l’a pas voté).

Jean_DUCHAMP

Ce PLH a l’ambition de répondre à des objectifs que je rappelle rapidement :

  • lutter contre la périurbanisation
  • redonner un dynamisme démographique dans les communes urbaines et celles dotées de services suffisants
  • et bien sûr permettre à nos concitoyens de se loger selon leurs revenus et leurs besoins.

Si le logement social était l’axe principal et parfois unique du PLH précédent, celui de 2012 à 2017 s’est construit en tenant compte de toute la chaîne de l’habitat public ou privé, locatif ou accession avec un regard particulier sur les formes urbaines et sur la qualité. L’ambition de donner les moyens et l’envie d’habiter en ville. Les promoteurs ont d’ailleurs largement participé à son écriture.

Parallèlement, la CAPV a pris deux initiatives importantes pour conforter ces objectifs :

  • La prise de compétence des opérations d’aménagement structurantes
  • La restructuration urbaine de quatre quartiers à Voiron, Voreppe et Moirans.

J’ai participé, en tant que vice-président à l’Équilibre Social avec Bernard Legrand, Alyne Motte et d’autres sous la responsabilité de Jean-Paul Bret à l’élaboration de ce Plan et je peux témoigner de la qualité du travail et des débats qui l’ont accompagné.

Même si nous ne partagions pas les mêmes étiquettes politiques, jamais ce chantier essentiel pour nos concitoyens n’est tombé dans des combats idéologiques stériles, des a-priori grossiers et/ou des arrière-pensées électoralistes dont nos concitoyens et particulièrement les plus fragiles sont le plus souvent les victimes.

Cette approche positive a déclenché une dynamique vertueuse ces 3 dernières années, exposée d’ailleurs dans ce document.

Je tenais à rappeler cet historique et si j’en crois le projet de territoire que nous avons voté il y a peu, ces objectifs ne sont pas remis en cause au moins dans le mots.

Mais ils ne sont que des vœux pieux s’ils ne sont pas accompagnés de moyens et d’outils : financiers et techniques (pourcentage, objectifs par territoire et par commune …)

Et c’est sur ce point que j’ai beaucoup d’inquiétudes.

Je ne doute pas de la volonté, des convictions et de l’énergie de Jean-Paul Bret, d’Alyne Motte et de quelques autres pour défendre ce dossier, ils le démontrent régulièrement. Mais sur ce point, l’exécutif est pour le moins loin d’être en phase.

A plusieurs reprises, le Président a rappelé les risques induits par la périurbanisation :

  • son coût financier et humain, à ce jour, d’ailleurs, insuffisamment pris en compte.
  • la baisse de population dans les communes urbaines malgré leurs services et leurs équipements,
  • la nécessité de renforcer la mixité sociale pour lutter contre la ségrégation spatiale (à relire le document très intéressant proposé par l’AURG sur ce sujet pendant l’élaboration du SCOT).

Il a réaffirmé fortement l’importance pour notre territoire de ne pas se contenter de paroles mais de conforter l’effort entrepris et de maintenir les moyens nécessaires à sa mise en œuvre.

Mais des élus dont le maire de Voiron, 1er vice-président de la CAPV ont certes écouté benoîtement et salué pieusement les propos du Président mais dans la foulée ont indiqué clairement qu’ils ne comptaient pas mettre en œuvre certains outils du PLH : 20% de logement social à Voiron, « un point c’est tout ».[2]

Je suis inquiet, le PLH que nous avons voté il y a 3 ans a du « plomb dans l’aile ». Le document qui nous a été présenté aujourd’hui et sur lequel nous devons délibérer n’est pas de nature à me rassurer, loin de là.

A juste titre, il salue un bilan 2014 à la hauteur des enjeux qui confirme les tendances observées sur les deux précédents exercices tant en terme quantitatifs que qualitatifs. Ce bilan s’inscrit bien dans une dynamique vertueuse. Le logement social pendant cette période s’est débarrassé des a-priori grossiers, des peurs irrationnelles plus ou moins entretenues et a été perçu comme un outil nécessaire à une évolution positive de la démographie de notre territoire.

En effet, au cours de cette même période, la production de logements sociaux dans les communes plus rurales de même que le taux positif de PLAI en sont le signe.

2015 bénéficie encore de cette dynamique, mais plusieurs éléments marquent déjà la fragilité de la programmation et le début d’une dégradation.

  • Beaucoup de communes rurales se sont dotées de logements sociaux avec parfois de grandes difficultés et grâce à un volontarisme important. Les promoteurs ou bailleurs sociaux sont peu intéressés et souvent exigeants. La réponse aux besoins de leur population et le manque de services et d’équipements va freiner cette évolution.
  • La part de la ville centre représente 35% au lieu de 70%, il nous faut en prendre acte. Pourquoi pas si les autres communes urbaines prennent le relais dans la durée, ce qui n’est pas gagné si on se réfère au document
  • 1/3 des opérations n’ont pas de bailleur social et parfois pas de promoteur désigné ce qui est un taux très insuffisant à cette date. La réalisation de cette programmation reste donc très incertaine.
  • Je suis surpris de ne pas voir apparaître dans cette programmation le quartier gare de Moirans qui a pourtant annoncé comme justifiant l’ouverture rapide d’un supermarché qui a fait dernièrement l’objet d’un débat.
  • Le pourcentage de logement sociaux dans les projets d’aménagement structurants est remis en cause sur le taux mais aussi sur la typologie. L’augmentation du nombre de PLS est inquiétant.

Je prends un exemple que je connais bien pour illustrer mon propos : le quartier de l’Hoirie.

Le projet initial prévoyait 10% de PSLA (accession sociale à la propriété) et 25% de logements sociaux répartis en 15% de PLUS, 10% de PLAI et aucun PLS.
Le nouveau projet prévoit seulement 20% de logements sociaux dont 75% de PLS, 25% de PLUS et aucun PLAI. Quand aux PSLA, ils n’apparaissent plus dans la programmation triennale.

Ce quartier était pourtant considéré comme un projet d’aménagement structurant.

Mais avec un taux de logement social inférieur même aux 21,6% du PLH, la disparition des PLAI et de l’accession sociale et la part donné aux PLS : la mixité sociale n’est plus. Le taux de 21,6% du PLH en 2017 est remis en cause et je mets en doute le caractère structurant de ce projet qui ne répond ni aux objectifs du PLH ni aux critères et sûrement pas à l’esprit de la compétence « aménagements structurants ».

Est t-il nécessaire de rappeler que le PLH demande 25% minimum dans toutes les nouvelles opérations pour la ville centre et les pôles principaux ?
Je sais que le PLS est du logement social et qu’il est comptabilisé dans le taux exigé pour les communes supérieures à 3500 habitants

Dernièrement, lorsque j’ai évoqué l’importance de respecter ces taux on m’a répondu : idéologie.

Mais derrière ces taux, mes chers collègues, n’oublions pas qu’il y a des gens, des vrais gens que nous côtoyons tous les jours qui ont du mal à se loger, ne peuvent pour beaucoup accéder à un logement PLS et parfois au logement tout court.

Doit on rappeler que 60 à 70% des demandeurs inscrits dans nos CCAS sont en dessous des plafonds PLAI et 30 à 40% en dessous de ceux des PLUS ?

Doit on rappeler qu’une institutrice en début de carrière, un fonctionnaire en catégorie C s’inscrit dans ces seuils [3], sans oublier les chômeurs et les travailleurs pauvres ?

Doit on rappeler que le logement social permet le parcours résidentiel et le maintien des plus jeunes dans nos communes ?

Doit on rappeler que lorsque la mixité sociale est oubliée ou niée, c’est maintenir des quartiers de plus en plus difficiles à vivre et encourager des discours d’exclusion inacceptables ?

Tout cela, ne doit-il pas réinterroger notre responsabilité d’élus ?

Mes chers collègues, je crains que notre PLH soit en train d’être détricoté subrepticement, en douceur. Ce qui se passe me fait penser à la grenouille qui se trouve bien dans l’eau tiède et qui ne peut plus s’échapper lorsque l’eau est devenue bouillante.

C’est pourquoi, je ne voterai pas cette délibération pour marquer mon inquiétude, appeler à un vrai débat sur cette question et attendre de l’exécutif un discours et des actes sans ambiguïté.

Merci de m’avoir écouté.


Notes de bas de page

[1] Compte-rendu du Conseil communautaire du 24 février 2015 (à venir)

[2] Compte-rendu du conseil communautaire du 27 mai 2014 (pages 19 à 21)

[3] Plafonds de revenus pour chaque type de logement social – Hors Ile de France


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