Parrainage du 93 ème RAM

Conseil municipal du 27 mai 2021

La majorité a souhaité proposer une délibération visant à officialiser un parrainage du 93ème RAM compte tenu des liens historiques avec notre commune par l’intermédiaire de l’adhésion à une association de loi 1901.

La commune souhaite demander l’agrément du parrainage du 93 ème RAM auprès du Chef d’État-major de l’Armée de terre, sous couvert de l’Association des Villes Marraines des forces armées. Elle souhaite également adhérer à l’Association pour une cotisation de 0,04 euros par habitant, afin de mener à bien cette démarche de parrainage. Ce parrainage a pour but d’établir un rapport privilégié entre une collectivité territoriale et sa population d’une part, et les personnels de l’unité opérationnelle d’autre part.

Nous y étions prêts.

Mais le fait d’imposer l’unanimité sans débat, de politiser toute remarque ainsi que la position d’Anne Gérin et de la majorité de demander aux personnes qui auraient un problème avec cette délibération de sortir de la salle le temps du vote oppose de manière artificielle et inutile deux grands principes de notre pays. Curieuse conception de la démocratie.

Voici notre intervention en séance.


Vous aviez prévu de passer cette délibération au mois de mars.

Face à nos questions, au fait qu’il n’y ait eu aucune discussion en amont entre tous les élus pour mieux comprendre les enjeux et les obligations d’une telle adhésion et sur le fait de la question de l’unanimité, vous l’aviez reportée.

Elle revient aujourd’hui, la discussion évoquée plus haut n’ayant toujours pas eu lieu. Par contre, votre tribune dans le Voreppe Emoi d’avril laissait entendre en substance que si nous ne vous suivions pas dans cette démarche c’est que nous étions anti-patriotiques. Une façon de préparer le terrain en espérant nous discréditer auprès des Voreppins.

L’armée telle que nous la connaissons aujourd’hui est l’héritière de celle de la levée en masse mise en place par la révolution française.

L’armée inexpérimentée qui a gagné la bataille de Valmy le 20 septembre 1792 et permis la proclamation de la république le 21 septembre 1792, était composée de gardes nationaux mais aussi de nombreux citoyens venus de la France entière pour défendre au-delà des frontières de la France, les idées de la révolution, l’abolition des privilèges du 4 août 1789, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, les valeurs de la liberté, de l’égalité, de la fraternité.

En 1793 la première conscription obligatoire pour les 18-25 ans est instituée. Une armée nationale pour défendre les valeurs de la république voit le jour.

Aujourd’hui, le rôle de notre armée reste de défendre nos frontières, nos concitoyens, nos valeurs de notre république démocratique.

Or, les valeurs de la démocratie, ce n’est pas l’unanimité, c’est la liberté de penser, d’être d’accord ou pas, de voter différemment les uns des autres.

Le président de la république n’est pas élu à l’unanimité, les députés ou sénateurs et tous les différents élus ne sont pas élus à l’unanimité, les lois ne sont pas votées à l’unanimité, les décisions d’envoyer des soldats à l’étranger sur des champs d’opérations ne sont pas votées à l’unanimité ; c’est la règle de la majorité qui fait loi. Autrement nous ne serions pas en démocratie. Même du temps de la conscription obligatoire, la Nation permettait l’objection de conscience ou le service civil, donc le choix de porter les armes ou pas.

L’association à laquelle vous proposez l’adhésion, sous couvert d’apolitisme (et on pourrait passer du temps à définir ce qu’est l’apolitisme), impose l’unanimité.

Cette demande d’unanimité est pour nous contraire aux valeurs de notre république que doit défendre notre armée.

Les liens avec le 93ème régiment d’artillerie de Montagne existent déjà. Voreppe subventionne par exemple la couse de vélo qu’il organise à l’ Alpe d’Huez. Les actions communes n’ont pas besoin d’un parrainage pour se faire. Les démarches pour mettre en place une classe de défense dans le collège n’ont pas besoin d’un parrainage pour se faire.

Donc, oui, l’armée est un élément important de notre État, nous respectons son rôle et l’engagement de ses membres.
Mais l’obligation dogmatique d’unanimité est incompatible pour nous avec les valeurs de la démocratie.

S’engager dans la démarche que vous proposez est un acte fort de respect envers nos forces armées : respect de leur engagement au service de notre démocratie, respect des valeurs dont elles doivent être le flambeau. Beaucoup d’entre nous y sont prêts.

Mais ce respect se doit d’être réciproque : respect du caractère profondément démocratique que représente un Conseil Municipal, respect des débats citoyens acceptant les avis différents.

Résumer tout débat démocratique, éventuellement certains désaccords, à des querelles partisanes ou de personnes n’est pas digne de nos institutions.

Comme l’est encore moins la demande en commission d’Anne Gérin, pourtant élue, que les conseillers municipaux qui auraient « des problèmes avec cette délibération », sortent de la pièce et ne participent pas au vote.

De tel propos, réitérés par monsieur le maire et madame Gérin, lors de la réunion des présidents de groupe qui précède le conseil municipal est indigne du respect dû à nos institutions, à nos électeurs, aux citoyens français

Nous sommes au regret de constater qu’au lieu de rassembler, de donner l’occasion de faire Nation autour de valeurs partagées, la présentation de cette délibération amène la division en excluant de manière manichéenne et dogmatique.

Nous vous prenons à témoin monsieur le Maire, ainsi que tous les élus présents, que notre discours ne vise aucunement le 93ᵉ RAM ou nos forces armées ou tout rejet de reconnaissance et valorisation de nos liens historiques mais est une demande de respect réciproque de deux grandes institutions de notre pays.

Aussi nous nous abstiendrons.