Cinéma – Création d’un tarif pour la mise en place de publicité

Conseil municipal du 15 décembre 2022

Une délibération présentée en conseil portait sur la vente de temps publicitaire avant les films projetés au cinéma.

Ce temps publicitaire étant limité à deux minutes par séance (pour commencer ?), nous avions levé en commission l’ambiguïté de la rédaction de la tarification.

La délibération indique en effet :

Les frais administratifs s’élèvent à 50 € par convention de diffusion (traitement + transmission des demandes), A cela s’applique le forfait de diffusion de la publicité à savoir 1,50 € la seconde concernant le spot publicitaire pour une semaine. Une réduction de 25 % s’applique sur le forfait de diffusion pour les institutions.

Nous n’avons pas eu de réponse en commission (puisque nous avons essayé de recalculer collectivement sur un coin de table, à la volée) mais également aucune réponse à nos demandes d’éclaircissement en amont du conseil municipal.

Le cafouillage de la séance du conseil municipal a été édifiant !

D’une part, le calcul a été refait et analysé en séance … ce qui n’est absolument pas l’endroit approprié. Cela montre clairement le manque de travail puisque l’on vote une délibération sans avoir le moindre ordre d’idée de ce qu’elle représente financièrement.

Suivant la lecture, le montant peut varier d’un facteur 30 ! Il y a environ 30 séances par semaine au cinéma, et tout dépend si l’on considère que les 1,50 € / seconde sont pour une séance ou pour la semaine (notre interprétation de la rédaction est que ce tarif s’applique sur la semaine quel que soit le nombre de séances).

D’autre part, madame Gérin affirme que l’aspect financier n’est pas l’objectif de la délibération, qui souhaite répondre à une demande de commerces locaux.

De son coté, le Maire, en fait au contraire un argument principal de sauvegarde du cinéma. Cet argument peut s’entendre mais est inquiétant sur la volonté politique de conserver notre cinéma municipal à terme et n’est pas sans danger vis à vis de sa dépendance à la publicité.

Une belle cacophonie illustrant le manque de recul vis à vis de cette délibération !

Voici notre intervention en séance.


Vous proposez la mise en place de spots publicitaires, jusqu’à 2 minutes, au début de chaque séance du cinéma de Voreppe au tarif de 1,50 € par seconde par semaine.

En premier lieu nous tenons à mentionner que cette question n’a pas été vue lors d’une réunion de la régie du cinéma. Dans cette instance siègent des Voreppins issus du monde de la culture, un lieu où la discussion sur cette proposition aurait eu toute sa place. Une fois de plus, malgré tous vos discours sur la concertation, on est loin de sa mise en pratique.

Sur le montant espéré en recette, nous avons été très surpris que le calcul n’ait pas été fait lors de la présentation en commission. Nous avons essayé de le calculer ensemble sur un coin de table, à la volée, lors de la commission. Mais le résultat obtenu pouvait être sujet à caution. Malgré nos demandes depuis, nous n’avons pas reçu à ce jour d’évaluation de cette recette.

Il est fort à parier que le tissu économique local ne pourra d’ailleurs pas mettre bien plus en publicité dans le cinéma de Voreppe.

D’autant ce sujet n’est pas qu’une histoire de gros sous mais aussi de principe.

Sur le fond, nous estimons que cette délibération va à l’encontre de l’intérêt du notre cinéma en banalisant l’expérience cinématographique. Les spectateurs ne viennent pas dans un cinéma « art et essai », ils ne payent pas la place d’un film grand public, pour voir de la pub. S’ils en veulent, ils restent chez eux dans leur canapé devant leur télé.

Vous annoncez restreindre cette publicité aux commerces locaux. Nous regrettons qu’aucune alternative n’ait été discutée avec les commerçants de Voreppe au travers de l’union commerciale. Un soutien gracieux avec par exemple l’affichage statique des horaires d’ouverture des membres de l’union commerciale auraient pu être construit.

Sur les messages de la publicité, il y a également un problème de positionnement, surtout pour un cinéma « art et essai ». Comment gérer les éventuelles contradictions entre le message du film que les spectateurs ont payé pour voir et une publicité qui irait à son encontre ? Par exemple, un film sur le réchauffement climatique et une publicité institutionnelle sur les stations de ski avec canons à neige ?

De surcroît, et il faut être très prudent, ce que l’on appelle communication institutionnelle peut être de la communication promotionnelle déguisée. « La région travaille bien pour vous » avec un gros panneau bleu comme dans nos rues ou « Le département de l’Isère est le mieux géré de France », avec notre vice-présidente du département qui porterait ce message sur les écrans de Voreppe.

Il ne nous semble pas souhaitable que ces considérations fassent leur entrée dans notre cinéma municipal.

Vous mettez en avant que les séances « jeunes » ne seront pas concernées. C’est un bon réflexe. Mais c’est dans le cadre de quelques séances dédiées, en aucun cas pour les films grands publics où des enfants accompagnent leurs parents.

Enfin, ce premier pas de spots publicitaires est un cheval de Troie qui inévitablement posera la question d’étendre cette publicité. Pour le cinéma, une grosse régie viendra mettre une pression financière, conditionnant l’obtention d’exclusivité de films. Pour le Voreppe Émoi, faut-il s’attendre à des encarts de publicité ? Ou des publi-reportages rémunérés ? Des spots sur les écrans de télévision que l’on a désormais dans la rue, nos panneaux d’information ? C’est techniquement possible, tout ça. Où s’arrêter ?

Le CAP est un cinéma municipal, c’est un élément de la politique culturelle de la commune. Aujourd’hui, les recettes des entrées ne couvrent pas les dépenses de fonctionnement (et ne les couvriront probablement jamais), aussi le cinéma reçoit une subvention d’équilibre ; une subvention qui rentre dans le cadre du soutien de la municipalité à la culture. Dans une politique culturelle pour le cinéma, l’enjeu est de faire venir plus de spectateurs.

Est-ce qu’imposer de la publicité commerciale aux spectateurs sert à la valorisation du cinéma ? La réponse est clairement non.

Nous voterons contre cette délibération.


Vous pouvez également lire notre tribune parue dans le Voreppe Emoi de janvier 2023