Voreppe Avenir

Vidéosurveillance : ces chères cameras

camera
Conseil municipal du 26 novembre 2015

Présentée au public à peine trois jours avant le vote, la mise en place de la video-surveillance était le point principal de ce conseil.

Un coût initial de 300 000€ (oui, c’est beaucoup pour Voreppe) pour 11 points de surveillance, des informations absentes ou imprécises, un débat éludé… pour quel résultat ?

Nous ne le saurons sûrement jamais puisqu’aucun diagnostic précis n’a été partagé et qu’aucun critère d’évaluation sur chacun des objectifs annoncés n’a été mis en place de manière transparente.

Nous vous laissons prendre connaissance de notre intervention ci-après.

Pour celles et ceux qui veulent approfondir, voilà également des liens vers quelques informations sérieuses sur le sujet [1]


Jean_DUCHAMP

Ce soir, nous sommes appelés à voter la mise en place de vidéo-protection à Voreppe.

Il s’agit d’une promesse électorale, il faut bien les tenir.

Certes, mais 300 000€ d’investissements ce n’est pas une petite somme pour une ville de notre taille, alors que le budget municipal se restreint de plus en plus.

Somme d’autant plus importante que vous n’êtes pas très précis ni sur le coût de fonctionnement, ni sur le budget de renouvellement.

De plus, nous ne savons pas quelle évolution vous comptez donner à ce dispositif sinon un vague projet de mutualisation avec Voiron pour une visualisation permanente des images. Quel sera le coût à long terme de ces évolutions en investissement et surtout en fonctionnement ?

Plusieurs remarques et quelques questions :

Concernant le débat et la concertation

En janvier nous avons voté une ouverture de créance de 100 000€. Lors de la discussion et en réponse à nos questions vous avez affirmé très clairement et je vous cite : « le débat aura lieu plusieurs fois aux différents stades d’avancement du dossier. Il a lieu aujourd’hui au regard du vote des 100 000€, il aura lieu au cours du vote du budget car ces 100 000€ y seront, lorsque le projet commencera à prendre forme ». Il semble qu’il ait pris forme sans débat justement puisque nous sommes appelés à le voter aujourd’hui.

Il y a eu une présentation en commission, il y a quelques jours au cours de laquelle vous n’avez pas su nous dire le coût de fonctionnement sinon qu’il était minime. Vous vous étiez engagé ce jour-là à nous faire parvenir les « nombreuses études » que vous avez analysées. Etudes, qui attesteraient de l’efficacité de ces systèmes et sur lesquelles vous vous appuyez pour justifier cette dépense. Nous n’avons rien reçu à ce jour.

En ce qui concerne le débat public, vous avez organisé en urgence une réunion publique 3 jours avant ce conseil pour démontrer que les habitants n’y sont pas opposés. C’est une mascarade, d’autant plus que le contexte actuel ne permet pas un débat public serein sur un tel sujet.

Cette question engage pourtant l’avenir de Voreppe sur le long terme sur le plan financier mais aussi sur notre politique de prévention. Elle mérite que l’on s’y attarde et qu’on en débatte sereinement. Nous ne pouvons nous contenter d’une présentation de quelques minutes en commission et d’une réunion publique à la veille du vote.

Vos électeurs, les nôtres aussi, méritent mieux que cela.

Concernant l’efficacité :

Vous installez sur le territoire communal 30 caméras pour 11 points, 3 caméras par point.

Chaque point est composé d’une caméra d’ambiance, d’une autre plus ciblée qui permet de repérer un numéro d’immatriculation et une autre qui surveille les 3 autres si j’ai bien entendu l’explication de Jean-Louis Soubeyroux lors de la réunion publique suite à une question sur les dégradations potentielles. C’est cher par point de surveillance : 30 000€ hors fonctionnement.

Vous avez vous-même convenu lors de la réunion publique que les caméras ne répondaient pas aux cambriolages dans les maisons et qu’elles ne réglaient pas tous les problèmes de la délinquance ni des dégradations mais qu’elles les déplaçaient le plus souvent. Luc Rémond a même plaisanté à ce sujet estimant qu’il préférait les voir ailleurs en citant une petite commune proche.

Ce point avait d’ailleurs été relevé par le maire de Moirans au Pays Voironnais. Il craignait que la multiplication des caméras dans les communes urbaines ne déplace la délinquance sur les petites communes et les mette en difficulté avec la tentation d’installer ces dispositifs sans avoir les moyens de les financer. C’est de fait une vision plus communautaire.

De même, lors de la commission, Anne Gérin s’est félicitée de la mise en place des caméras vers l’Arcade et l’Arrosoir car elles lui éviteraient les remarques en conseil d’administration du collège sur les trafics qui se déroulent au vu et au su de tout le monde sur ces lieux.

Curieuse remarque, en effet, les caméras ne permettront pas d’en arrêter les auteurs sinon de déplacer le trafic, et leur identification est inutile puisqu’ils sont apparemment connus de tous. Un aveu d’impuissance finalement ! Ce n’est pas ainsi que vous allez restaurer un sentiment de sécurité.

Mais si le Conseil d’Administration du collège est satisfait ?

Pour ce qui est des incivilités, vous annoncez en réunion publique 70 000 € de dégradations sur la commune. Vous ne donnez aucun chiffrage sur les points effectivement situés dans le champ des cameras ainsi qu’aucune analyse d’économies attendues suite à ces installations.

Ces quelques remarques pour mettre en évidence le manque de réflexion et de sérieux dans l’élaboration de ce projet, qui rappelons-le est financé par l’argent public.

Plus sérieusement, nous renouvelons nos questions :

  • Quel diagnostic précis a été fait en amont ?
  • Comment ont été choisies les points d’implantation ?
  • Quelle efficacité en attendez-vous ?
  • Sur quel(s) type(s) de faits ?
  • Sur quelles études sérieuses et reconnues basez-vous votre projet ?
  • Quels sont les indicateurs chiffrés qui permettront de mesurer son efficacité et quelles sont leur valeur à ce jour (avant l’installation) ?
  • Que prévoyez-vous en terme d’évaluation ?

Toutes ces questions sont importantes car justement son efficacité n’est à ce jour aucunement prouvée. A noter que c’est le plus souvent un rapport de 2009 au départ confidentiel puis devenu public qui est le plus souvent mis en avant pour justifier le déploiement de la video-surveillance. Mais ce rapport est contesté par la plupart des experts et même par la Cour des Comptes sur le fond et sur la forme.

Avant de prendre cette décision il serait judicieux de lire avec soin le rapport de la Cour des Comptes sur « l’organisation et la gestion des forces de sécurité publique de la page 125 à 145 qui dénonce qu’ “aucune étude d’impact, réalisée selon une méthode scientifiquement reconnue, n’a encore été publiée“, alors même que les premières villes vidéo-surveillées le sont depuis le milieu des années 90, et que le gouvernement ne cesse d’en vanter les mérites …

Revenant sur le rapport réalisé, à la demande du ministère de l’Intérieur, afin de démontrer “l’efficacité de la vidéo-surveillance“, les magistrats soulignent “les résultats contradictoires ainsi que sa méthode (qui) ne permettent pas d’en tirer des enseignements fiables”. Il dénonce aussi l’absence d’évaluation sérieuse.

Il indique qu’il ne faut pas mélanger la video-surveillance dans les lieux fermés (bus, métro, gare …) et les caméras installées sur la voie publique. Les caméras en lieux fermés, les plus nombreuses, ont démontré leur efficacité. Les autres n’ont pas fait l’objet d’un travail de recherche spécifique. Mélanger ces chiffres, c’est biaiser les résultats et ne pas refléter la réalité.

Quant à la résolution des affaires grâce à la vidéo-protection, son intérêt dans certains cas n’est pas contesté, mais il faut rapprocher les chiffres de résolution avec l’ensemble des enquêtes pour avoir une idée précise sur son efficacité. Lorsque c’est fait, son intérêt devient très relatif.

Pour se faire une idée plus précise concernant la vidéo-protection et avant de prendre toute décision irréversible il serait nécessaire :

  • de lire le document de la Ligue des Droits de l’Homme « 30 questions sur la vidéo surveillance »,
  • de prendre connaissance de quelques études de spécialistes et experts reconnus sur ce sujet,
  • de regarder l’émission d’Elise Lucet Cash Investigation sur le sujet intitulé « le business de la peur ». Ce reportage, très documenté réalisé par des journalistes d’investigation reconnus pour leur expertise, dénonce lui aussi le rapport du ministère de l’intérieur, fait tomber un certain nombre d’idées reçues et évoque le gaspillage de l’argent public. Il aborde aussi d’autres outils de sécurité et met en avant le lobbying des sociétés privées.

Nous transmettrons tous ces liens au service communication pour qu’ils les partagent avec les Voreppins qui méritent d’être informés « à charge et à décharge » comme on dit. Pour ceux qui le souhaitent vous les trouverez sur notre site.

Concernant la politique de prévention :

Vous mettez en avant le lien et la nécessité de travailler avec le CISPD, le CODASE et les travailleurs sociaux. Mais, alors que 300 000€ sont prévus en investissement et un coût de fonctionnement de 15 000€ que nous estimons sous évalué, vous diminuez le budget annuel jeunesse de 37 000€ (divisé par 4), le CISPD est devenu une coquille vide et le Conseil Départemental envisage de baisser fortement le budget prévention et donc la présence d’éducateurs de rue.

Dans ces conditions, par quelles autres mesures de prévention vous envisagez d’accompagner le dispositif de vidéosurveillance en 2016 ?

Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : je ne conteste pas que dans certains cas et après examen une caméra ne soit pas nécessaire, c’est ce que nous avions indiqué dans notre campagne municipale [2].

Mais cette installation massive de caméras ne répond en rien aux enjeux de sécurité de notre commune et de protection de nos concitoyens.

Voilà pourquoi nous voterons contre ce projet présenté dans l’urgence. Il s’appuie plus sur le dogmatisme que sur des bases sérieuses. Il manque de cohérence, d’anticipation financière. Ce n’est pas un projet construit.

L’attrait d’une subvention, la volonté de faire comme tout le monde ou d’utiliser la peur parfois légitime de nos concitoyens ne justifient pas de telles dépenses.



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1 commentaire pour “Vidéosurveillance : ces chères cameras

  1. Gilberte
    7 décembre 2015 at 10 h 56 min

    La semaine dernière j’ai vu, à la télé, l’interview d’un maire qui avait prévu d’installer des caméras dans son village, en comptant sur la subvention annoncée par l’état. Or, toujours dans l’interview, il signale qu’il a appris que l’état ne subventionne plus ces frais-là, et s’inquiète donc pour les finances de sa commune. J’ai aussitôt pensé à ce que j’ai entendu lors du conseil municipal de ce jeudi 26 novembre : une subvention de l’état de 40%, voire plus !! (à suivre)

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